Depuis quelques années, je cherche à parler de mon époque à travers des sujets qui évoquent la liberté mais aussi des conséquences que provoque ce désir instinctif.
Contrairement à l’idée courante et répandue qui considère la liberté comme un état obtenu ou non (Je suis libre/je ne suis pas libre) ; j’envisage la liberté complètement différemment et préfère évoquer la notion de processus. Un cheminement à phases multiples et successives formant une boucle infinie : asservissement, privation, frustration, rébellion, combat, libération et enfin l’oubli.
Ainsi, nous sommes tous libres d’une manière ou d’une autre (par nos pensées, nos paroles, nos choix et nos actions) et par équilibre, prisonnier du système dans lequel nous vivons (qui nous asservit, nous prive, nous frustre etc..).
Cet équilibre change et évolue, ce qui redéfinit en permanence les limites de la liberté et de nos libertés. Mais détermine aussi des combats de petites ou grandes importances faisant bouger la ligne d’un côté ou de l’autre.
Ce qui est intéressant dans ce processus, c’est qu’un homme peut vivre heureux dans une dictature et malheureux dans une démocratie et inversement. Néanmoins, par l’observation, la comparaison, et l’information, nous comprenons qu’un équilibre existe ailleurs et autrement, malmenant à chaque instant notre propre idée de la liberté.
Ainsi, la liberté devenant un processus, il n’existe ni fin ni début mais plutôt un chemin où l’on se trouve à un moment T qui sera suivi inévitablement d’un autre moment.
Si ce processus se répète de génération en génération, c’est qu’il obéit à une mécanique simple et permet de rythmer notre histoire alternant phases de conflits et phases de paix.
De fait, des guerres de conquêtes aux combats idéologiques, chacun tente d’imposer un idéal de vie en éliminant l’autre.
A la différence des époques passées, les relais d’informations sont multiples et instantanés ce qui a considérablement transformé notre perception des conflits. Par ailleurs, l’énorme quantité de données disponibles a forcé une normalisation des codes de transmissions pour qu’ils soient facilement traités et assimilés et ce, quelque soit leur importance.
Ainsi, s’opère insidieusement une surenchère mécanique de l’information favorisant l’oubli et le désintérêt d’une donnée obsolète sur une échelle de temps raccourcie. Ce que l’on oubliait en dix ans, s’oubli en 6 mois.
De ce constat, j’ai tenté de mettre en place une recherche mémorielle visant à lutter contre l’oubli à travers des toiles témoignant de mon présent qui sera bientôt le passé.
Pour y parvenir, je m’aide de travaux de grands reporters de guerres, échange avec eux, et réalise des toiles mêlant vérité et sentiments.
J’ai commencé ce travail en 2011 avec les photographies d’un jeune reporter de guerre, Rémi Ochlik en réinterprétant certains de ses clichés. En février 2012, celui-ci meurt à Homs, en Syrie, sans pouvoir voir le résultat présenté à la Chapelle des Capucins à Aigues mortes en 2012.
Depuis, j’ai continué mon travail en élargissant mes sources et me suis intéressé à différents conflits (printemps arabe, syrie, palestinien et centre afrique) en cherchant à obtenir une réalité « augmentée ».
Ces trois dernières années, j’ai collaboré avec Patrick Chauvel et Margaux Bergey et me suis inspiré d’une dizaine d’autres journalistes pour réaliser mes œuvres.